A PUTEAUX, ce ne sont pas les débats
qui marquent la vie municipale, mais bien plus ce qui se déroule
en marge. La soirée d'hier en aura été encore une
fois la consternante preuve. Venus soutenir un militant du PS, qui se
voit systématiquement interdire l'accès du conseil municipal,
des manifestants ont été brutalement refoulés.
Une demi-heure avant la tenue du conseil, prévu pour 19 heures,
l'ambiance se tend progressivement. Les militants de gauche, Puteaux
Alternative, Les Verts, retrouvent le premier secrétaire fédéral
du Parti socialiste, Pascal Buchet, maire de Fontenay-aux-Roses. Francine
Bavay, vice-présidente du conseil régional (Les Verts),
Michel Lobry (PS), Dominique Cloarec (Les Verts), Gabriel Massoux (PCF)
sont là aussi. En haut des marches, une petite dizaine d'hommes
gardent l'entrée. "Nous n'ouvrons pas les portes avant 18
h 55", prévient l'un d'eux.
"La faillite de l'Etat"
Soudain d'autres manifestants s'approchent en cortège par le
bas de la rue de la République. Leurs banderoles dénoncent
"la provocation", "les pressions totalitaires",
et les "socialo-communistes". A la tête : Joëlle
Ceccaldi, députée, première adjointe et fille du
sénateur-maire Charles Ceccaldi Raynaud (UMP), suivie d'élus
de la majorité et de quelques dizaines de sympathisants. La marche
de ces contre-manifestants s'accompagne rapidement du traditionnel chant
"Il fait bon vivre à Puteaux".
Eux gagnent sans peine l'hôtel de ville, mais les militants et
élus de gauche qui tentent de les suivre se font refouler par
les "gardiens de la mairie". Immédiatement, Pascal
Buchet en appelle à la police nationale. Des consignes préfectorales
avaient été données pour éviter tout désordre
sur la voie publique. "J'ai été molesté, lance-t-il
au commissaire de district. Je vous demande de nous escorter pour entrer,
ou bien je noterai qu'il s'agit de la faillite de l'Etat, puisque normalement,
tout un chacun a le droit d'assister au conseil municipal", demande
Pascal Buchet.
Le commissaire l'accompagne et parvient péniblement à
franchir le cordon musclé des hommes de la mairie. Quelques journalistes
sont également autorisés à le suivre, après
maintes demandes. Sur le côté, riant, Charles Ceccaldi-Raynaud
se fend d'un : "Je trouve ce début de soirée magnifique
et enthousiasmant", lâche-t-il...
La séance n'a toujours pas commencé, et les militants
de gauche en seront privés. "Tu me fous tout le monde dehors
!" hurle un homme à un de ses agents. La bousculade est
encore plus violente. Des journalistes cameramen se font molester, un
autre déplore le vol de son carnet de notes et évite un
coup de pied. Sur les marches, un policier muni d'un brassard prend
à parti un agent de sécurité...
Totalement consternés, Christophe Grébert et ses soutiens
s'en repartent. Les cinq élus de l'opposition choisissent de
ne pas siéger. "Dans la bousculade, j'ai été
à moitié déshabillée", raconte émue
Nadine Jeanne, élue du PS. "J'ai vu Christophe Grébert
se faire molester... Les conditions ne sont pas normales
pour siéger. Cette situation est invivable pour nous, les élus.
A chaque fois nous nous faisons huer par les sbires de Ceccaldi."
Plusieurs plaintes ont été déposées au commissariat
et les élus d'opposition projetaient de demander l'annulation
de cette séance du conseil, qui s'est bel et bien tenue. Pascal
Buchet, lui, promettait de saisir dès aujourd'hui le ministre
de l'Intérieur de ce qu'il appelle un "scandale de la République".
Carole Sterlé