L'événement - Echauffourées à la mairie de Puteaux
PUTEAUX, HIER, 19 HEURES. Les militants et élus venus soutenir Christophe Grébert, habituellement interdit d'accès au conseil municipal, se sont tous fait refouler manu militari de l'hôtel de ville par des hommes de main du sénateur-maire, Charles Cecca (LP/C. S.)


A PUTEAUX, ce ne sont pas les débats qui marquent la vie municipale, mais bien plus ce qui se déroule en marge. La soirée d'hier en aura été encore une fois la consternante preuve. Venus soutenir un militant du PS, qui se voit systématiquement interdire l'accès du conseil municipal, des manifestants ont été brutalement refoulés.
Une demi-heure avant la tenue du conseil, prévu pour 19 heures, l'ambiance se tend progressivement. Les militants de gauche, Puteaux Alternative, Les Verts, retrouvent le premier secrétaire fédéral du Parti socialiste, Pascal Buchet, maire de Fontenay-aux-Roses. Francine Bavay, vice-présidente du conseil régional (Les Verts), Michel Lobry (PS), Dominique Cloarec (Les Verts), Gabriel Massoux (PCF) sont là aussi. En haut des marches, une petite dizaine d'hommes gardent l'entrée. "Nous n'ouvrons pas les portes avant 18 h 55", prévient l'un d'eux.
"La faillite de l'Etat"
Soudain d'autres manifestants s'approchent en cortège par le bas de la rue de la République. Leurs banderoles dénoncent "la provocation", "les pressions totalitaires", et les "socialo-communistes". A la tête : Joëlle Ceccaldi, députée, première adjointe et fille du sénateur-maire Charles Ceccaldi Raynaud (UMP), suivie d'élus de la majorité et de quelques dizaines de sympathisants. La marche de ces contre-manifestants s'accompagne rapidement du traditionnel chant "Il fait bon vivre à Puteaux".
Eux gagnent sans peine l'hôtel de ville, mais les militants et élus de gauche qui tentent de les suivre se font refouler par les "gardiens de la mairie". Immédiatement, Pascal Buchet en appelle à la police nationale. Des consignes préfectorales avaient été données pour éviter tout désordre sur la voie publique. "J'ai été molesté, lance-t-il au commissaire de district. Je vous demande de nous escorter pour entrer, ou bien je noterai qu'il s'agit de la faillite de l'Etat, puisque normalement, tout un chacun a le droit d'assister au conseil municipal", demande Pascal Buchet.
Le commissaire l'accompagne et parvient péniblement à franchir le cordon musclé des hommes de la mairie. Quelques journalistes sont également autorisés à le suivre, après maintes demandes. Sur le côté, riant, Charles Ceccaldi-Raynaud se fend d'un : "Je trouve ce début de soirée magnifique et enthousiasmant", lâche-t-il...
La séance n'a toujours pas commencé, et les militants de gauche en seront privés. "Tu me fous tout le monde dehors !" hurle un homme à un de ses agents. La bousculade est encore plus violente. Des journalistes cameramen se font molester, un autre déplore le vol de son carnet de notes et évite un coup de pied. Sur les marches, un policier muni d'un brassard prend à parti un agent de sécurité...
Totalement consternés, Christophe Grébert et ses soutiens s'en repartent. Les cinq élus de l'opposition choisissent de ne pas siéger. "Dans la bousculade, j'ai été à moitié déshabillée", raconte émue Nadine Jeanne, élue du PS. "J'ai vu Christophe Grébert se faire molester... Les conditions ne sont pas normales
pour siéger. Cette situation est invivable pour nous, les élus. A chaque fois nous nous faisons huer par les sbires de Ceccaldi."
Plusieurs plaintes ont été déposées au commissariat et les élus d'opposition projetaient de demander l'annulation de cette séance du conseil, qui s'est bel et bien tenue. Pascal Buchet, lui, promettait de saisir dès aujourd'hui le ministre de l'Intérieur de ce qu'il appelle un "scandale de la République".
Carole Sterlé

"Je me demande de quoi le maire a peur"
CHRISTOPHE GREBERT, interdit de conseil municipal depuis un an et demi
Depuis qu'il a lancé le 1er avril, son site monputeaux.com, Christophe Grébert est interdit de conseil municipal. "Ce site n'est ni diffamant ni insultant, c'est juste un espace de dialogue", insiste ce journaliste obstiné d'une trentaine d'années qui vit à Puteaux et qui adhère au PS.
Sur son site, on peut y lire des forums de discussion, des dossiers spéciaux consacrés à la police municipale, aux clubs sportifs, des coulisses de la vie locale…
Mais, selon Charles Ceccaldi-Raynaud, maire UMP de Puteaux, les "prises de position de Christophe Grébert sont tellement détestées que sa sécurité ne serait pas assurée en séance du conseil". Et le Code des communes précise que le maire est seul maître de la police lors des séances…
Une chose est en tous cas certaine : avec plus de 113 000 visites à ce jour (contre 7 000 pour notreputeaux.com, qui montre la municipalité sous un meilleur jour), le site de Grébert a en tout cas atteint une notoriété bien au-delà des frontières de Puteaux. Brutalement refoulé hier encore de la mairie, Christophe Grébert lâche les interrogations qui le hantent : "Je ne comprends pas pourquoi je gêne autant. Je vote, je m'intéresse à la vie locale et associative… Je me demande de quoi le maire a peur. Il a le pouvoir depuis trente cinq ans mais ne supporte pas la critique. Voyez, pour nous empêcher de nous exprimer, il balance la sono. C'est scandaleux…"