L'Europe, Société du recyclage : un voeu pieux ?


Le CNIID dénonce le texte adopté hier par le Conseil des ministres de l'Environnement, réuni à Luxembourg, sur la révision de la Directive cadre sur les déchets, comme une opportunité manquée de favoriser le recyclage, de réduire le gaspillage des ressources naturelles et l'impact environnemental de la gestion des déchets en Europe. Le CNIID s'insurge en particulier de la possibilité de requalifier l'élimination des déchets par incinération en " opération de valorisation ", ce qui encouragerait le transfert de déchets entre pays de l'Union européenne.

" Il est aberrant de promouvoir l'incinération plutôt que le recyclage et la réduction des déchets, tant du point de vue climatique que de l'économie des ressources naturelles. Les ministres de l'Environnement ont fait faire hier un grand pas en arrière à la politique déchets de l'Union européenne en étant incapables de proposer une vision à long-terme pour la gestion des déchets en Europe" déclare Eric Gall, directeur du CNIID.

Contrairement au Parlement européen, qui a réclamé le 15 février dernier des objectifs de 50% de recyclage des déchets ménagers d'ici 2020 (et 70% pour les déchets industriels), le Conseil ne s'est fixé aucun objectif, ni en matière de recyclage, ni en matière de prévention. A la place, le Conseil a adopté la formule de la Commission, basée sur un coefficient énergétique, qui permettrait à certains incinérateurs d'obtenir le statut d'opération de valorisation, alors que l'incinération est à l'heure actuelle considérée par la Cour européenne de justice comme un traitement d'élimination des déchets. De plus, à la demande de la France, il serait possible d'abaisser encore les exigences d'efficacité énergétique en fonction des " conditions climatiques locales ". La seule concession faite aux pays opposés à l'incinération, comme la République tchèque, qui craignent d'être envahis de déchets étrangers, est la possibilité de s'opposer à des importations de déchets s'ils prouvent que celles-ci ne sont pas conformes à leurs plans nationaux de gestion des déchets ou qu'elles entraîneraient la mise en décharge de leurs propres déchets.

" Le gouvernement français avait toutes les cartes en main pour améliorer le compromis et soutenir les pays qui s'opposaient à la reclassification de l'incinération. Malheureusement, le ministre a préféré soutenir le lobby français de l'incinération, malgré les faibles performances énergétiques des incinérateurs français et la pollution qu'ils engendrent ", déplore Eric Gall. " La position française dans cette négociation n'augure rien de bon pour le Grenelle de l'environnement concernant la politique déchets".

Par ailleurs, le Conseil a refusé de donner un caractère contraignant à la hiérarchie à cinq niveaux de traitement des déchets. Cette hiérarchie, qui place la prévention en tête des actions à mener dans la politique déchets, puis la réutilisation, le recyclage, la valorisation et en dernier l'élimination ne constitue qu'un principe de conduite et non une règle générale comme le souhaitait les ONG. Le texte adopté hier par le Conseil n'est pas le texte final, puisque le Parlement européen, qui avait considérablement amélioré la proposition de la Commission en première lecture, devra se prononcer à nouveau sur la révision de la Directive cadre sur les déchets en début d'année prochaine.

Communiqué du CNIID du 29 juin 2007